Varsovie, 1939. Une troupe de théâtre répète Gestapo, une pièce comique sur Hitler. Une des comédiennes, Maria (Carole Lombard), l’épouse de Joseph Tura (Jack Benny), flirte avec Sobinsky (Robert Stack), un pilote polonais. Siletzki (Stanley Ridges), un agent double, doit communiquer des documents aux nazis, mais Sobinsky essaye d’empêcher la transaction. Il est désormais aidé dans cette mission par la troupe qui, sa pièce ayant été censurée, décide de reprendre Hamlet.
Chef-d’œuvre de la comédie et un des chefs-d’œuvre de son réalisateur, voici comment on pourrait qualifier To Be or Not to Be d’Ernst Lubitsch. Commencé au moment où les États-Unis étaient encore neutres, le film participe finalement bien à « l’effort de guerre hollywoodien », à la suite de l’engagement du pays dans le conflit mondial. Pour autant, il est mal accueilli : comment peut-on rire du bombardement de Varsovie et des actions de la Gestapo ?
L’humour de To Be or Not to Be est féroce, l’écriture étincelante, la mise en scène irrésistible. Le nazisme est ainsi ridiculisé et la liberté – liberté politique, liberté de pensée, liberté amoureuse – célébrée. Avec sa finesse et son intelligence coutumières, Lubitsch interroge la puissance du faux, le rapport entre illusion et réalité, le couple, et le théâtre comme arme de résistance face à une terrifiante entreprise de mort. Pour Jean Douchet (Cahiers du cinéma n°127, janvier 1962), « les personnages […] veulent éprouver la permanence de la vie, lorsqu’ils se livrent à l’éphémère, ou se livrer à l’éphémère, lorsqu’ils éprouvent la permanence ». Un sentiment apparemment contradictoire, une urgence de vie.
« Que le film ait été tourné en pleine guerre s’explique aisément. Dans le chaos engendré par le conflit, où l’adversaire avait fait du spectacle (défilé, cérémonies, etc.) une arme psychologique capitale (voir Le Triomphe de la volonté, de Leni Riefensthal), chacun tentait de se définir pour ne pas perdre le flot. Pour les acteurs de To Be or Not to Be, le meilleur moyen était encore de jouer le jeu jusqu’au bout sans cesser de se voir jouant : paradoxe du comédien. […] To Be or Not to Be représente le type même de l’œuvre où le spectacle se confond avec la vie. Fascinant jeu de miroirs où l’un éclaire l’autre et réciproquement, les héros n’étant jamais vraiment eux-mêmes, sans cesser non plus d’être totalement. Position périlleuse de moraliste sceptique qui tranche à sa manière le fameux dilemme shakespearien offert par le titre, en le traitant comme un faux problème. » (Michel Ciment, Image et son n°185, juin 1965)
To Be or Not to Be
États-Unis, 1942, 1h39, noir et blanc, format 1.37
Réalisation Ernst Lubitsch
Scénario Edwin Justus Mayer, d’après une histoire de Melchior Lengyel et Ernst Lubitsch (non créd.)
Photo Rudolph Maté
Musique Werner R. Heymann
Montage Dorothy Spencer
Décors Vincent Korda
Costumes Irene (pour Carole Lombard)
Production Ernst Lubitsch, Romaine Film Corporation
Interprètes Carole Lombard (Maria Tura), Jack Benny (Joseph Tura), Robert Stack (le lieutenant Stanislav Sobinski), Felix Bressart (Greenberg), Lionel Atwill (Rawitch), Stanley Ridges (le professeur Alexander Siletsky), Sig Rumann (le colonel Erhardt), Tom Dugan (Bronski), Charles Halton (Dobosh, le metteur en scène), George Lynn (l'adjudant-acteur), Henry Victor (le capitaine Schultz)
Sortie aux États-Unis : 6 mars 1942
Sortie en France : 21 mai 1947
Restauration 2K supervisée par Studiocanal et réalisée au laboratoire Eclair.
Distributeur : Les Acacias
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