Rio Escondido, ville d'enfer

Lumière Classics

Rosaura (María Félix), institutrice rurale, est envoyée par le gouvernement dans le lointain village de Rio Escondido. Elle y est reçue avec hostilité. Cette bourgade perdue est tout entière aux mains du tyran local,  Don Regino Sandoval (Carlos López Moctezuma). Depuis longtemps abandonnée, l’école lui sert d’écurie pour ses chevaux, à qui il donne l’eau qu’il refuse aux paysans. La jeune femme comprend rapidement la lutte qu’elle devra mener contre cet homme et ceux qui le servent. Don Regino décide de séduire Rosaura.

Né en 1904 d’une mère indigène et d’un père colonel, Emilio Fernández est un des plus grands cinéastes mexicains. Il passe sa jeunesse à militer avec les révolutionnaires Madero et Pancho Villa et accumule les séjours en prisons. À 23 ans, pour échapper à une nouvelle condamnation, il traverse le Rio Grande à la nage et rejoint les États-Unis. Arrivé à Hollywood, il enchaîne les petits boulots et sera notamment la doublure de Douglas Fairbanks. Dans les années 30, il retourne au Mexique et devient acteur, avant de passer derrière la caméra en 1942 avec La isla de la pasión. Surnommé "El Indio", « l’Indien », il reçoit un des Grands Prix du Festival de Cannes en 1946 pour son film Maria Candelaria (1944).

Rio Escondido, ville d'enfer dépeint la réalité sociale des Amérindiens, l’analphabétisme des populations et les luttes territoriales contre les grands propriétaires. D’une beauté formelle poignante, ce film est le fruit d’une nouvelle collaboration entre Emilio Fernández et Gabriel Figueroa, illustre photographe et chef opérateur mexicain qui avait travaillé avec John Ford et travaillera avec Luis Buñuel et John Huston.

« En six ou sept films extraordinaires, Emilio Fernández, réalisateur, et Gabriel Figueroa, opérateur, ont fait du Mexique un des plus grands pays cinématographiques. […] La vision de la presque totalité de l’œuvre commune de Fernández-Figueroa […] nous fait découvrir le but qu’ils poursuivent à travers leurs films. À savoir : rendre aux Indiens la dignité humaine, apprendre aux femmes indiennes à ne plus être un bétail, aux hommes à se révolter contre la tyrannie que font peser sur eux les descendants des conquérants espagnols. » (Simone Dubreuilh, Libération, 8 avril 1950)