Propriété interdite

Sydney Pollack

Pendant la crise économique des années 30, Owen Legate (Robert Redford), agent des chemins de fer, est envoyé à Dobson, Mississippi, pour fermer une large partie des activités ferroviaires et licencier le personnel. Il rencontre Alva Starr (Natalie Wood), jeune fille perdue et principal attrait de la ville…

Lorsque Sydney Pollack rejoint Propriété interdite, le projet est déjà bien avancé. Le film était initialement prévu pour Richard Brooks, puis pour John Huston, avec Elizabeth Taylor. Au moment où il reprend le film, le script en est à sa seizième version, les acteurs et chef-opérateur engagés, les repérages faits. Le cinéaste accepte le projet pour l’histoire d’amour contrarié et pour son ami Robert Redford. Propriété interdite sera ainsi le premier des sept films que Sydney Pollack tournera avec son acteur fétiche : « Cette collaboration a été fructueuse et mutuellement bénéfique, le personnage redfordien correspondant au type de héros réservé, secret, insaisissable qu’affectionne le cinéaste. » (Bertrand Tavernier et Jean-Pierre Coursodon, 50 ans de cinéma américain, Omnibus)

Adapté d’une pièce en un acte de Tennessee Williams, Propriété interdite raconte, dans la moiteur des États du Sud, l’innocence perdue de l’Amérique. Si Owen, désabusé et amer, remplit sa pénible mission sans y adhérer, la lumineuse Alva, exploitée par une mère abusive, refuse de renoncer à son rêve américain. Pour Jean-Pierre Berthomé, « jamais ensuite, sinon dans On achève bien les chevaux […], Pollack n’indiquera aussi clairement les limites de ce rêve et la responsabilité du cinéma hollywoodien dans sa propagation. » (Positif n°572, octobre 2008)

Pollack fait le portrait de l’Amérique de son temps à travers une évocation des années 30 et traite, en sourdine et avec une grande élégance, les émotions du couple Redford-Wood (rayonnante et magnétique, Natalie Wood hypnotise) qui se débat avec la fatalité du destin.

« Que cette notule serve à énumérer (trop rapidement) l’exubérante richesse mythologique du scénario de Tennessee Williams, la création toute magique de Natalie Wood et l’originalité plastique du lyrisme – conception des scènes, rapports des personnages, fulgurance du rythme. Un des grands films complètement poétiques – plus proche de Kazan que de Brooks – sur le Temps gagné par la folie. » (André Téchiné, Cahiers du cinéma n° 194, octobre 1967)