Le Sud

Célébrations - Hommage Fernando Solanas

1983, fin de la dictature militaire en Argentine. Floreal (Miguel Ángel Solá) sort de prison après cinq ans d’incarcération. Cinq ans à attendre de retrouver les siens. Mais en cinq ans, le pays a changé et les siens aussi.

« Mon film est un chant de reconnaissance à la vie, à travers la métaphore de l’histoire d’un retour. Celui d’un auteur. D’un couple. D’un pays. » (Fernando Solanas)

Après avoir décrit l’exil à Paris dans Tangos, Solanas raconte l’exil intérieur des Argentins restés au pays, en prison pour certains. C’est le récit d’une nuit d’errance, la nuit du retour, la plus désirée, mais également la plus redoutée. Tout a changé. Floreal doit retrouver sa compagne, Rosi, mais celle-ci n’a pas pensé qu’à lui pendant son incarcération : elle a eu une aventure avec un Français, exilé en Argentine. Entre amour et rancœur, désir et appréhension, il erre, réapprend à vivre avant de rentrer chez lui. Un long chemin qui mènera à une aube libérée.

L’aventure sera poétique. Entre chien et loup, l’atmosphère est envoûtante. Solanas convoque les fantômes, ces morts qui rappellent aux vivants une conscience collective. Dans un univers onirique, baigné de fumée, les rues deviennent planches de théâtre. Car l’histoire est bien une tragédie en quatre actes (Table des reines, La recherche, L’amour et rien d’autre, Mourir fatigué), où le chant nostalgique de Roberto Goyeneche, qui déchire l’âme, joue les chœurs antiques. Une mise en scène brillante, récompensée par le Prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 1988.

« Difficile, voire impossible retour, bien décrit par un autre Argentin, Mario Goloboff, “réellement, physiquement, géographiquement retourné” dans son pays, où “il n’a plus retrouvé ce qu’il songeait y trouver, où il ne s’est pas trouvé non plus”. Rien n’est plus comme avant, “ le quartier est rempli d’absences”, il y a des vides “à la table des rêves”, le chanteur n’a plus de musiciens. Ceux qui restent sont remodelés par des années de terreur. Les regards surtout ont changé : voilés de pleurs, troublés de peur, épuisés d’attente, pire encore, déformés de méprises et de malentendus infiltrés entre les barreaux ou à travers les guichets de parloirs. » (Gérard Mérat, Cinéma n°442, 18 mai 1988)