Un cheval blanc s’agenouille et meurt. Des veaux sont décapités. Un travailleur fredonne La Mer de Charles Trenet.
Premier film de Georges Franju (il avait coréalisé en 1935 un court métrage, Le Métro, avec Henri Langlois, avec qui il fonda, en 1936, la revue Cinéma/Tographe et la Cinémathèque française), Le Sang des bêtes plonge le spectateur dans des lieux inconnus du grand public, les abattoirs de la Villette, le long du canal de l’Ourcq, et ceux de Vaugirard, Porte de Vanves.
Des plans du marché aux Puces à ceux de l’abattage d’un cheval, le choc est brutal. De ces images apparemment disparates, difficilement soutenables, naît un lyrisme brutal. Car le cinéaste a cherché à « restituer au réel documentaire son apparence d’artifice et au décor naturel son propre aspect de décor "planté" » (Georges Franju, Saint-Cinéma-des-Prés n°3, 1950)
Puissant documentaire vériste baigné par le génie poétique de son auteur, le court métrage offre des images d’une sombre et dérangeante beauté (le sang fumant des bêtes dans le froid glacial), filmant une industrie de mort : « Parce qu’il faut bien manger et faire manger les autres ».
« Pas une prise de vue qui n’émeuve, presque sans motif, par la seule beauté du style de la grande écriture visuelle. Certes le film est pénible. Sans doute l’accusera-t-on de sadisme parce qu’il empoigne le drame à pleines mains et ne l’élude jamais. Il nous montre des tueurs sans haine dont parle Baudelaire. Il nous montre le sacrifice des bêtes innocentes. Il arrive parfois à rejoindre la tragédie par la terrible surprise de gestes et d’attitudes que nous ignorions et en face desquels il nous pousse brutalement. Le cheval frappé de front et qui s’agenouille, déjà mort. Les réflexes de veaux décapités qui s’agitent et semblent se débattre. Bref un monde noble et ignoble qui roule sa dernière vague de sang sur une nappe blanche où le gastronome ne doit plus songer au calvaire des victimes dans la chair desquelles il plante sa fourchette. » (Jean Cocteau, Paris-Presse, 9 septembre 1949)
Le Sang des bêtes
France, 1949, 22min, noir et blanc, format 1.37
Réalisation & scénario Georges Franju
Commentaire Jean Painlevé
Photo Marcel Fradetal
Musique Joseph Kosma
Montage André Joseph
Production Paul Legros, Forces et voix de la France
Avec Nicole Ladmiral (la voix de la narratrice), Georges Hubert (la voix du narrateur)
Restauration réalisée à partir d'un scan 4K des négatifs originaux par le laboratoire du CNC. Son restauré par les équipes de l'Image Retrouvée (Paris).
Restauration 4K de La Cinémathèque française
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