La Princesse errante

Histoire permanente des femmes cinéastes

1937. La jeune Ryuko (Machiko Kyo) est la fille aînée d’une famille noble. Un jour, une escorte militaire vient lui annoncer qu’elle a été choisie pour épouser Futetsu (Eiji Funakoshi), le frère cadet de l’empereur du Mandchoukouo. La famille est d’abord hésitante, mais Ryuko accepte cette union après avoir rencontré le jeune homme, gentil et intelligent. Un amour sincère s’installe.

Cinq ans après avoir réalisé Maternité éternelle, Kinuyo Tanaka tourne en 1960 son premier film en couleurs et en format large. La Princesse errante est un film particulier, reconstitution historique d’une époque très récemment révolue. En 1959, Hiro Saga, épouse du frère cadet de Puyi, dernier empereur de la dynastie Qing, publie ses mémoires, qui deviennent immédiatement un best-seller. Un contrat est passé pour leur adaptation au cinéma.

Lorsque le Japon perd la guerre et bat en retraite, le Mandchoukouo, État fantoche de Mandchourie, disparaît. La cour impériale doit fuir. Futetsu et Ryuko sont séparés, et l’épouse et sa fille sont jetées sur les routes, errant de refuges en camps. Jusque-là, Ryuko avait essayé de construire, à force de compréhension, une harmonie familiale et un pont entre les deux cultures, chinoise et japonaise. Mais ces efforts sont mis à mal par la force brutale du militarisme et son énergie masculine destructrice et dominante. Le couple, déchiré entre deux pays, est prisonnier de l’Histoire en marche, et son statut social ne pourra le protéger.

Pour cette histoire de destin féminin, c’est à la scénariste Natto Wada (épouse de Kon Ichikawa et future scénariste de La Vengeance d’un acteur en 1963) qu’il est demandé d’adapter le récit. Pour autant, Kinuyo Tanaka ne contournera pas, bien au contraire, les difficultés des reconstitutions historiques et dirigera avec talent les scènes d’action. Récit de la fuite d’une princesse destituée, La Princesse errante est une œuvre importante dans la filmographie de Kinuyo Tanaka, dans laquelle la cinéaste souligne une fois encore le désir de modernité et de liberté d’une femme contrainte par son époque.