La Fracture

Invités du festival : Avant-premières

Raf (Valeria Bruni Tedeschi) et Julie (Marina Foïs), un couple au bord de la rupture, se retrouvent dans un service d’urgences proche de l’asphyxie le soir d’une manifestation parisienne des Gilets jaunes. Leur rencontre avec Yann (Pio Marmaï), un manifestant blessé et en colère, va faire voler en éclats les certitudes et les préjugés de chacun. À l’extérieur, la tension monte. L’hôpital, sous pression, doit fermer ses portes. Le personnel est débordé. La nuit va être longue…

Un film urgent, inscrit dans le présent, qui confronte des paroles antagonistes, dans un contexte anxiogène, pour dire la ou les fractures de la société française aujourd’hui : Catherine Corsini avait déjà entamé cette analyse de l’époque dans Trois mondes, en 2012, déjà en Sélection officielle au Festival de Cannes. Ici, c’est une visite aux urgences, suite à un accident domestique, qui a fourni à la cinéaste le lieu explosif de son onzième film. Le décor, mais aussi le rythme, tendu, en suspens : « Ce lieu clos des urgences est un micro-monde où rien ne s’arrête jamais, explique-t-elle. Il faut soigner et dans le même temps, on attend. Comment filmer l’attente sans s’ennuyer ? J’ai cherché à être toujours en mouvement, même fixe. Je voulais battre au même rythme que le pouls de l’hôpital, où l’on sait que tout peut se jouer en quelques minutes. »

Tourné en pleine pandémie de Covid (ce qui a obligé à reconstituer un hôpital sur le modèle de La Riboisière), mais situé quelques mois avant, le récit réaliste confronte deux femmes de la bourgeoisie parisienne à un "gilet jaune", sous le regard d’une infirmière qui souffre du manque de moyens. Derrière les blessures et les revendications de chacun, la possibilité d’un dialogue. « Catherine, qui ne nous avait guère habitués à ce rythme, ce brio, plonge ses personnages dans ce chaudron. L’époque est là. La comédie envahit ce drame qui se voulait social. Il y avait un danger à traiter une actualité aussi fraîche. La réalisatrice s’en tire grâce à ses acteurs Pio Marmaï est sans cesse sur le point d’exploser. Valeria Bruni Tedeschi vole de nombreuses scènes […]. Marina Foïs joue à merveille les excédées. » (Éric Neuhoff, Le Figaro, 10 juillet 2021)