Lau Kin-Ming (Andy Lau) a infiltré la police pour le compte d’une organisation criminelle. Il est considéré comme une recrue exemplaire et gravit les échelons. Chan Wing Yan (Tony Leung Chiu-wai) a suivi l’itinéraire inverse et joue les taupes au sein de la pègre. Condamnés à mener une double vie, les deux hommes se livrent un duel impitoyable pour se démasquer et s'éliminer mutuellement.
À la fin des années 1990, le cinéma hongkongais, marqué par la crise et l’expatriation de ses grands réalisateurs, peine à retrouver son élan. Au creux de la vague, Andrew Lau et Alan Mak signent avec Infernal Affairs, en 2002, un polar survolté, taupe contre taupe, réglé comme une partie d’échecs.
Hommage au cinéma de la décennie précédente, Infernal Affairs prolonge cette tradition du film noir en évoquant le cinéma de Tsui Hark et, surtout, celui de John Woo. Mais les deux cinéastes entendent renouveler le genre, et l’action cède le pas à une intrigue brillante et millimétrée.
Andrew Lau, qui a fait ses preuves en tant que chef opérateur auprès de Wong Kar-wai, offre au film une photographie stylisée. Les cinéastes orchestrent un redoutable jeu de miroirs, où les deux imposteurs se lancent dans une course contre la montre pour confondre l’ennemi. La mise en scène est nerveuse et la tension psychologique, implacable, repose sur une traque faite de filatures, d’écoutes clandestines et de regards soupçonneux.
Le premier volet de la trilogie est, pour Mak et Lau, un prologue qui prend toute son ampleur dramatique au fil des opus suivants. « Le titre anglais nous ouvre les portes d’un gouffre. Calligraphié comme un labyrinthe, le titre chinois, plus énigmatique, presque intraduisible, les referme derrière nous : “la voie sans espace” […]. Tel est l’enfer de la trilogie de Mak et Lau, un univers “sans espace”, sans limites, ou des êtres enchaînés les uns aux autres, rendus vulnérables par leur appétit mutuel, sont voués à s’entredévorer […]. Film noir plus que film d’action, Infernal Affairs est aussi une tragédie. Tissant leur toile par de longs mouvements circulaires et de lents fondus enchaînés, Andrew Lau et Alan Mak nous enferment dans une description angoissante, précise et géométrique de l’enfer sur terre. » (Adrien Gombeaud, Positif n°523, septembre 2004)
Dès sa sortie, Infernal Affairs fait figure de classique. Le film est un succès, à Hong Kong comme à l’étranger, et rafle les récompenses. Les cinéastes enchaînent dès 2003 avec les épisodes 2 et 3 (tournés simultanément), prequel puis suite, jouant sur la chronologie du récit. Pour Jérôme Fabre, « les valeurs de base sont les mêmes : multiplicité et richesse des caractères, ampleur et ambiguïté des actions, perfidie et opacité de la morale. En bref, une fresque virtuose en exergue de laquelle on eût pu placer la fameuse devise de Renoir “personne n’a tort, chacun a ses raisons”. » (Jeune Cinéma n°306/307, décembre 2006)
Dans cette trilogie, tout est dualité et opposition, les infiltrés, leur quête, la vitesse contre la lenteur, l’action que contrebalance une véritable contemplation. C’est l’histoire d’une crise d’identité, à la limite du dédoublement schizophrène, et en creux, celle d’une société paranoïaque en proie à ses angoisses. De l’action pure, irriguée par une impressionnante dimension mentale.
En 2006, le premier opus fera l’objet d’un remake prestigieux, en inspirant à Martin Scorsese Les Infiltrés, preuve s’il en fallait d’un coup de maître(s) et du retour en grâce du polar hongkongais.
Infernal Affairs II (Mou gaan dou II)
Hong-Kong, Singapour, Chine, 2003, 1h59, couleurs, format 2.39
(Interdit aux moins de 12 ans)
Réalisation Andrew Lau, Alan Mak
Scénario Alan Mak, Felix Chong
Photo Andrew Lau, Ng Man Ching
Musique Chan Kwong Wing
Montage Danny Pang, Pang Ching Hei
Décors Bill Lui
Costumes Silver Cheung
Production Andrew Lau, Media Asia Films, Basic Pictures
Interprètes Anthony Wong (Wong), Eric Tsang (Sam), Carina Lau (Mary), Francis Ng (Ngai Wing Hau), Edison Chen (l’officier Lau Kin Ming), Shawn Yue (Chan Wing Yan), Jun Hu (Luk), Joe Tung Cho Cheung (Kwun)
Sortie à Hong Kong : 1er octobre 2003
Présentation au Festival de Cognac : 11 avril 2004
Restauration inédite 4K par L’Immagine Ritrovata, étalonnage par One Cool Production, à partir du négatif original 35mm scanné et restauré en 4K.
Distributeur : La Rabbia
Ressortie le 16 mars 2022.
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