Ah ! Ça ira

Trésors et curiosités

1947, en Hongrie nouvellement socialiste. De jeunes étudiants issus d’un "collège populaire" débarquent dans un collège catholique, afin de convaincre les élèves de rallier leur mouvement. L’humeur joyeuse et le dialogue suscité dans un premier temps laissent maintenant place aux divisions. Les autorités communistes interviennent…

Après des études de droit, d'ethnographie et d'histoire de l'art, Miklós Jancsó (1921-2014) sort diplômé de l'École de cinéma de Budapest en 1951. La carrière du cinéaste commence réellement en 1959, avec le film Les cloches sont parties à Rome, puis Cantate (1963), les années précédentes ayant été consacrées à la réalisation de courts métrages majoritairement documentaires et de reportages d’actualités. Il crée une œuvre exceptionnelle, originale et engagée, et sera considéré comme un des plus importants représentants de la Nouvelle Vague hongroise de la fin des années 60 et 70. Dans un style unique, avec ses mouvements de caméra fluides dessinant une chorégraphie dramatique et son utilisation symbolique de la couleur, le cinéma de Jancsó constitue une réflexion sur l'Histoire et ses ambiguïtés.

Avec Ah ! Ça ira, le cinéaste réalise un film où les gestes, les couleurs, les images, les chants se répondent dans un puissant et fascinant ballet. La thèse du film est simple : le pouvoir absolu, qu’il soit celui des révolutionnaires ou celui du régime en place, n'est jamais au service de la liberté du peuple.

« Ah ! Ça ira est un film d’une qualité absolue, une dénonciation désespérée de toutes les tyrannies, de tous les abus de toutes les idéologies qui, à un moment de l’histoire méprisent et torturent l’homme. Spectacle très pénible dans la mesure où Jancsó n’épargne ni les staliniens, ni les gauchistes, ni les faux libéraux. […] Si le mot polémique a un sens, si le rôle de cinéaste dépasse celui d’un amuseur public, alors c’est bien à Jancsó que revient cette année la palme de l’honneur, de l’honnêteté individuelle. […] Ah ! Ça ira est peut-être un film scandaleux, mais alors dans le meilleur sens du terme : si sa rage choque, c’est que les œillères nous empêchent de supporter le reflet de la vérité. » (Henry Chapier, Combat, 5 novembre 1969)