Posté le 11.10.2021
Jean-Louis Trintignant se raconte sans détours dans Trintignant par Trintignant, un documentaire de Lucie Cariès. S’y dévoile un être profond et sensible, à la personnalité énigmatique.
Pour nombre d’acteurs et d’actrices avec lesquels il a partagé l’affiche, il fut un partenaire réservé mais attentif, qui, d’un sourire, d’un regard, d’un silence ou d’une remarque distillée de sa voix captivante, savait éclairer un chemin ou brouiller les pistes, toujours avec élégance. Jean-Louis Trintignant reste une énigme pour la plupart de ceux qui l’ont un jour côtoyé sur un plateau de cinéma. Une personnalité complexe qui a toutefois su jouer de sa part de mystère pour dessiner les contours de son immense trajectoire d’acteur, comme le rappelle avec finesse Lucie Cariès dans Trintignant par Trintignant, un documentaire coécrit avec Yves Jeuland.
« J’ai le culte de la folie alors que je suis tout le contraire car j’ai les pieds sur terre. Je passe ma vie à me détruire, mais c’est un chemin où je me retrouve toujours », explique Jean-Louis Trintignant dans l’une des séquences clé du film. Dans une autre, il confie tout aussi frontalement que s’il a choisi parfois d’interpréter « un salaud », c’est parce qu’il « porte » ça en lui.
Qui est vraiment Jean-Louis Trintignant ? Lucie Cariès répond par l’autoportrait et laisse le soin au comédien de se dévoiler au travers de nombreux extraits de conversations dans lesquelles il se confie parfois à cœur ouvert. Par un savant travail de montage de ses confidences et de séquences issues de ses partitions parmi les plus célèbres, la cinéaste invite chacun à se forger sa propre opinion. « En me plongeant dans ses archives, je me suis rendu compte qu’il avait été interrogé un nombre de fois incalculable à différents moments de sa carrière. Il paraissait naturel de lui donner la parole et que sa voix accompagne le spectateur. Bien sûr, on ne sait jamais vraiment à quand il est totalement sincère et à quel moment il nous promène un peu », détaille la réalisatrice, qui s’est également entretenue avec l’acteur pour « créer un dialogue entre le Trintignant d’hier et celui d’aujourd’hui ».
Pour illustrer son insondable ambivalence, le documentaire rappelle notamment que c’est au cœur d’une tragédie personnelle, la mort de sa fille cadette Pauline à la veille du tournage du Conformiste, de Bernardo Bertolucci (1970), que Jean-Louis Trintignant va puiser l’essence de ce qu’il considère encore aujourd’hui comme son plus grand rôle. Celui qu’il choisira tout du moins pour révéler à l’écran toute sa complexité d’homme. « Dans cette archive-là, il est d’une franchise folle et se met complètement à nu », estime Lucie Cariès. « Le tournage du Conformiste a constitué le pivot de sa vie ».
Benoit Pavan
Trintignant par Trintignant de Lucie Cariès (2021, 52min)
Villa Lumière lu11 14h15