Posté le 15.10.2021
Une fausse comédie musicale au scénario invraisemblable et savoureux. Grangier 1ère manière.
La signature de Gilles Grangier ? On pourrait la trouver dans ce travelling d’ouverture d’Histoire de chanter, remontant une longue file de jeunes femmes impatientes que l’on fait rentrer au compte-gouttes dans un mystérieux bâtiment. Le cinéaste était friand de ce mouvement d’appareil dynamique. En l’occurrence, on pourrait croire que ces femmes attendent une vente exceptionnelle – les pénuries de l’Occupation ne sont pas encore tout à fait un souvenir -, ou le casting d’un film, mais non, elles brûlent de rencontrer l’idole qui fait tourner les têtes, Gino Fabretti, le ténor séducteur à la roucoulade irrésistible… Gino, c’est Luis Mariano, alors en pleine ascension, bientôt victime d’une machination (rigolote) ourdie par Noël Roquevert, génial en chirurgien jaloux. Le chanteur va, littéralement, partir à la poursuite de sa voix…
Histoire de chanter, 1947
Histoire de chanter appartient à la première période de Gilles Grangier, alors qu’on le cantonne encore à la comédie, souvent musicale – il a déjà dirigé à deux reprises Georges Guétary. Ici, en contrepoint comique du troubadour à la voix d’or, la gouaille de Carette, savoureux livreur d’épicerie amoureux, fait merveille (Grangier avait un temps envisagé Bourvil, lui aussi à l’aube de sa carrière). Et le scénario du génial humoriste Cami (dont Chaplin avait salué le talent) flirte avec le fantastique – Les Mains d’Orlac, version opérette : c’est grâce à son extravagance que les non-marianistes peuvent aussi apprécier le film. A noter une mise en scène – statique – de Rigoletto à l’Opéra de Nice (dont le baryton est assez irrésistible). C’est amusant parce qu’on est à l’époque où Mariano va définitivement tourner le dos à l’opéra, préférer Francis Lopez à Verdi. Pour protéger sa voix, sans doute…
Aurélien Ferenczi
Histoire de chanter de Gilles Grangier (1947, 1h35) Restauration SND
Lumière Terreaux ve15 19h30 | Pathé Bellecour sa16 19h