Posté le 11.10.2021
Amateur de reprises et cinéphile, la grande Jeanne Cherhal donne ce soir un concert « Cinéma », composé de chansons de films. Dont elle révèle l’élaboration savante.
Comment est née l’idée de ce concert ?
J’étais venue chanter pour la soirée du Prix Lumière décerné à Coppola, il y a deux ans, j’avais repris l’adaptation du thème du Parrain et j’avais adoré cet exercice d’adaptation pour un piano/voix. Thierry Frémaux avait dû apprécier, il m’a proposé cette carte blanche ludique et si vaste : le répertoire paraît infini ! On a échangé de façon informelle sur nos B.O préférées, à la fin du déjeuner, on avait un répertoire énorme, un concert de 4h30. Il a fallu que je taille un peu ! J’ai passé l’été 2020 dessus, deux mois en immersion dans les morceaux, à chercher comment tirer un piano/voix de chaque chanson, il y en avait où c’était simple, d’autres où il fallait chercher un peu plus. J’aime bien le mot rabâcher : alors, j’ai beaucoup rabâché, répété, je n’ai pas écrit ces morceaux, alors il faut qu’ils ne quittent pas mes doigts ! En tout, il y a 15 chansons.
Ce sera un concert polyglotte ?
Je vais chanter en trois langues… J’avais envie qu’Almodovar soit présent dans ma « set list », c’est un réalisateur que je vénère. Je reprends Piensa en mi, immortalisé par Luz Casal dans Talons aiguilles. Je ne suis pas spécialement hispanophone, j’ai fait un peu d’espagnol au collège, il m’en est resté cet amour pour la langue. Mon anglais est peut-être pire, mais j’avais très envie de reprendre la chanson de La Boum, Dreams are my reality, c’est complètement générationnel, un cri du cœur pour moi.
La chanson plus difficile à adapter ?
J’ai passé énormément de temps sur l’adaptation d’un thème de Philippe Sarde pour L’Horloger de Saint-Paul, très orchestral. C’était un vrai défi, super à faire. C’est un instrumental. De Sarde, je chante aussi La Chanson d’Hélène, de Romy Schneider, enregistrée après le tournage des Choses de la vie. J’ai un faible pour ce morceau, son thème mélodique, j’ai l’impression de me brancher directement du cœur au clavier du piano ! C’est la chanson parfaite. Bon, j’ai revu le film il y a quelques jours et avec mon regard d’aujourd’hui, je dois avouer que n’ai pas tout adoré de la relation entre Piccoli et Schneider !…
© DR
Chanter les mots d’un autre, c’est libérateur ?
D’une certaine manière, oui. C’est comme endosser un petit costume qu’on a bien retaillé pour soi, mais un petit costume différent à chaque morceau. J’aime bien l’exercice de la reprise, j’aime bien ne pas trop écouter les chansons que je vais reprendre pour voir comment elles ont infusé en moi, pour les reprendre humblement à a manière. Et puis il y a des titres-culte que je voulais absolument reprendre : La Vie et un long fleuve tranquille, d’Etienne Chatiliez est un film absolument mythique pour ma famille et moi, il était hors de question de de ne pas inclure Jésus revient.
Une chanson pour un film, c’est souvent un pas de côté pour un auteur-compositeur ?
Je ne sais pas, je pensais récemment à la chanson Le Zèbre, au générique du film de Jean Poiret d’après Alexandre Jardin. Pour moi, c’est un sommet dans l’art d’Alain Souchon ! J’ai participé récemment à la bande originale de Tralala, la comédie musicale des frères Larrieu, j’ai écrit pour Mélanie Thierry. J’étais vraiment cornaquée par le scénario, il y avait une somme d’informations précises à glisser dans la chanson, mais, j’ai adoré avoir ces contraintes.
Propos recueillis par Aurélien Ferenczi
MUSIQUE !
Concert de Jeanne Cherhal, « Cinéma »
Institut Lumière Lu 19h45