Conversation

Je suis une créature « Rivettienne »


Posté le 15.10.2021


 

Empruntant toujours les chemins de traverse, avec un humour ravageur, lamythique actrice Bulle Ogier a conquis la salle de la Comédie Odéon. Une rencontre élégante, drôle et un peu fantasque, à son image.

 

Les débuts avec Marc’O

Avec Marc’O, on a travaillé de 1961 à 1967 au théâtre, jour et nuit. On a fait ensemble la pièce Les Idoles. C’est devenu un succès, auquel on ne s’attendait pas. Vous savez, on n’était intéressés ni par l’argent, ni par la notoriété. La pièce est devenue un film que nous avons tourné avec les acteurs Pierre Clémenti et Jean-Pierre Kalfon. On formait un sacré trio : on nous appelait les anticonformistes, on était plutôt rebelles !

L’Amour fou avec Jacques Rivette

Jacques Rivette nous a choisis Jean-Pierre Kalfon et moi pour jouer dans L’Amour fou. C’est l’histoire d’un homme et d’une femme qui se séparent. A l’époque, Jacques, Jean-Pierre et moi étions en pleine séparation avec nos conjoints respectifs, donc on était très concernés par la question ! J’étais très innocente, même naïve, je n’avais pas le sens de la caméra : cette innocence m’a beaucoup aidé. Il y a quelque chose de magique qui s’est passé sur ce film. Avec Jacques, nous avons eu un lien particulier sur des décennies, à travers le cinéma. Je revendique un peu l’idée que je suis une créature « Rivettienne ».

 

bulleogier_renerlea-28 © Léa Rener



La Vallée : l’aventure, c’est l’aventure

Le tournage du film La Vallée, de Barbet Schroeder a duré six mois en Nouvelle-Guinée : il y avait toujours des incidents ! Des cases prenaient feu, on a eu à la cantine du poisson empoisonné au datura, une plante toxique qui peut donner des hallucinations. Le directeur de la photographie Néstor Almendros avait perdu ses lentilles dans la jungle, il ne pouvait plus tourner ! S’il y avait eu un making of de ce tournage ; il aurait été génial !

Une actrice fracassante

Notre lien avec Barbet Schroeder et Rainer Fassbinder, c’était l’actrice allemande Ingrid Caven. Quand Fassbinder venait à Paris, il était content que Barbet soit là, un peu pour le protéger, on était amis. C’était une période où l’on s’amusait beaucoup, les années 80. Fassbinder tournait très vite et me parlais toujours en allemand et je ne comprenais rien ! Un jour, j’ai frappé à sa porte, j’ai tellement tapé que la porte s’est dégondée. Après cela, Fassbinder m’a mieux considérée. Faut quand même le faire de défoncer la porte de son metteur en scène !

 

Propos recueillis par Laura Lépine

 

Catégories : Lecture Zen