Une « messe laïque » pour Tavernier

 


Posté le 11.10.2021


 

Un Auditorium plein comme un œuf a célébré hier la mémoire du réalisateur disparu. Avec une émotion rare.

 

L’évocation d’un artiste disparu a-t-elle déjà donné lieu à une soirée aussi joyeuse ? D’abord, est-il mort, Bertrand Tavernier ? Ses images, sa parole courent encore dans les rues. A fortiori ici à Lyon, qu’il a contribué à placer sur la carte de la cinématographie mondiale et dont l’Institut Lumière est le plus beau bijou. La soirée a commencé - et s’est terminée - par une ovation debout, avant même que le moindre mot eut été prononcé. Suivait alors un voyage à travers ses films, conçu et porté par Thierry Frémaux, bien sur ses appuis, mais dont la voix trahit ponctuellement une émotion inhabituelle au cours de ce qu’il a qualifié de « messe laïque » : imaginée « pour qu’on se souvienne ce qu’il apporté à la ville de Lyon, à l’art en général ».

Le directeur de l’Institut Lumière a poursuivi : « Nous avons été nombreux à avoir vu nos vies changer à son contact, moi le premier chamboulé par cette conférence de presse [donnée en 1982 NDLR] dans le sous-sol du château Lumière afin d’y annoncer la création de l’Institut. »

 

hommage-bertrand-tavernier-chassignoleSamuel Le Bihan, Jacques Gamblin et Raphaël Personnaz lisent des fragments de l'autobiographie inachevée de Bertrand Tavernier
© Olivier Chassignole


Entre les extraits de films - Le Juge et l’assassin, Des enfants gâtés, Autour de minuit - de nombreux intermèdes musicaux sont venus ponctuer la soirée pour saluer cet enfant du jazz, avec le concours céleste du trio d’Henri Texier, ou de Jeanne Cherhal. Le point d’orgue a sans doute été atteint au terme de la lecture des pages inédites de son autobiographie inachevée. A tour de rôle, debout face à un micro, sans autre cérémonial que la lumière qui caressait leur visage dans la pénombre, Raphaël Personnaz, Jacques Gamblin et Samuel Le Bihan ont lu des extraits consacrés à la disparition de son ami Didier Bezace, « parti, écrit Tavernier, rejoindre le cercle des hommes qui m’entourent et qui sont par la force des choses de plus en plus nombreux. J’adorais son goût du partage, sans pédanterie, ni discours dogmatique, ou moralisateur », lui qui aimait « le contact du public sans jamais chercher à le flatter ». A l’évidence, en évoquant son copain disparu juste un an avant lui, c’est à une sorte d’autoportrait déguisé que Tavernier se livrait au crépuscule de son existence.

Carlos Gomez

 

hommage-bertrand-tavernier-chassignole-2 © Olivier Chassignole

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