Master class : Philippe Sarde

« La musique peut changer une scène »


Posté le 13.10.2021


 

Avec l’élégance et l’humour qui le caractérisent, le compositeur Philippe Sarde est revenu sur son parcours à la Comédie Odéon.

 

Son goût pour le cinéma

Dans mon enfance, la musique était une évidence, ma mère était chanteuse à l’Opéra de Paris. Mais au fond de moi, la chose qui me fascinait le plus, c’était le cinéma. Lorsque j’ai eu cinq ans, on père m’a offert un petit projecteur. Le pouvoir de la musique est incroyable au cinéma, elle peut changer une scène.

Trouver son rythme

Pour composer une musique de films, je pense qu’il ne faut pas trop regarder l’image. Une fois que j’ai vu une scène, elle reste gravée dans ma tête et j’essaie de trouver son rythme profond. La musique devient le chronomètre qui peut raccourcir ou dilater le temps d’une scène. On peut faire des miracles avec le temps grâce à la musique.

Les Choses de la vie

Je sors de la projection des Choses de la vie et je dis à Claude Sautet : qu’est-ce que Romy est belle ! Il ne répond pas et je vois des larmes dans ses yeux. Et puis il me dit : « on commence l’enregistrement de la musique du film dans un mois, tu seras prêt ? » Un mois plus tard, j’étais devant soixante-dix musiciens.

 

SARDE_2© Léa Rener

Bertrand Tavernier, le complice de toujours

Quand j’avais 25-26 ans, on organisait avec Bertrand des projections des films, par exemple de Jean Sacha, en sa présence. On faisait beaucoup de projections comme ça. Mon amitié avec Bertrand, ma complicité avec lui, m’ont donné envie de l’épater à chaque coup. Son envie, sa boulimie de tout dans la vie était aussi ce qu’il voulait pour la musique de ces films. Il disait toujours ce fameux « formidable » qui nous donnait envie de refaire une scène et d’être encore meilleur.

Coup de Torchon

Pour la scène d’ouverture du film, je voulais mettre les spectateurs en condition d’être surpris, étonnés par la musique, comme une ouverture d’opéra, juste avant que le rideau ne s’ouvre. Bertrand avait tourné une fin différente de celle que vous connaissez, avec deux singes. Je lui ai dit : « Bertrand, ça ne va pas du tout la fin, je vais te construire une scène de fin et tu m’enlèves ces deux singes ! » J’ai essayé d’être dur avec lui. Je lui ai écrit la fin du film en musique et il a monté les images sur cette composition, c’est ce que l’on appelle de la scénarisation musicale. On ne peut faire ça qu’avec des gens que l’on aime et avec qui on est complices. Coup de Torchon est l’un des plus beaux films de Bertrand.



Propos recueillis par Laura Lépine

Catégories : Lecture Zen