Master class : Édouard Baer

« J'adore les gens qui transpirent »
  


Posté le 12.10.2021


 

 

Au cours d’une masterclass forcément enjouée, le fantasque Édouard Baer a distillé, de digressions en boutades, des anecdotes dont lui seul a le secret.

 

Un cinéma de rencontres

C’est difficile d’avoir une vision d’ensemble de sa carrière quand on est une succession de petits accidents ! Quand comme moi, on n’est pas né cinéaste, il faut être fasciné par quelqu’un qu’on veut filmer. Il faut aimer quelqu’un pour le filmer. Ce que j’aime, c’est de rencontrer des gens qui me bouleversent, qui sont singuliers, stupéfiants. J’aime les personnalités fortes, qui vivent à leur manière, et les filmer pour être avec elles. Le cinéma donne de la profondeur à des gens qui ont l’air normaux. Des cinéastes réussissent à nous les faire aimer infiniment. De mon côté, je prends des gens singuliers que j’ai besoin d’admirer. Par exemple, Benoit Poolevorde !

 

L’art de la fuite

C’est beau la chaise vide. Je trouve ça très beau, quelqu’un qui ne vient pas. Comme Dutronc, qui aurait dû jouer dans un Spielberg. Il a préféré ses chats. J’aime les losers magnifiques. J’ai d’ailleurs toujours préféré Marcello Mastroianni à John Wayne. Dans la vie, j’adore les héros, mais ceux qui ont des âmes d’enfants.

 

Baer MC Loic Benoit© Loic Benoit

 

Le ridicule

Je suis fasciné par le ridicule, par la gêne, par les types qui s’emmêlent, qui s’enfoncent. J’adore les gens qui rougissent, qui transpirent et qui pleurent. Comme ces couples qui se donnent des coups de pieds sous la table pendant les repas. On est tous comme ça. On aimerait qu’il y ait juste moins de témoins pour le constater.

 

Son processus créatif

Au cinéma, ce qui est merveilleux, c’est de trouver des solutions pour les autres, pour les filmer. Au théâtre, on le fait pour sauver sa peau ! Je ne sais pas prévoir, j’aime tout faire en direct. J’aime bien avoir l’impression que c’était ce soir et pas un autre. J’aime réussir à rendre compte de ça au cinéma. Si on peut être réactif, je suis convaincu que ça ressort à l’écran. On aime aussi se faire un peu peur dans nos vies très chanceuses.

 

Édouard l’acteur

J’ai été très longtemps très mauvais car je n’arrivais jamais à oublier la caméra. J’ai une admiration pour les acteurs qui, au milieu de tout ce cette machinerie, arrivent à des choses impeccables. C’est quelque chose que je ne saurai jamais faire. J’ai besoin de ne pas savoir que ça tourne. Alors je me crée des petites bulles.

 

Son monologue dans Astérix, Mission Cléopâtre

Je n’avais pas un rôle important et il y avait des monstres autour de moi. Ce monologue, c’est tout le talent d’Alain Chabat d’avoir su mettre ses acteurs en confiance. Ce n’était pas facile. C’était un luxe de tourner une improvisation avec celui qui avait le huitième rôle ! J’ai joué pour amuser Alain, pour le faire rire. On ne sait jamais trop pourquoi les gens s’approprient ces phrases, et c’est devenu culte sans que je comprenne pourquoi.

 

Propos recueillis par Benoit Pavan

 

Catégories : Lecture Zen