Marché

Résister, disent-ils


Posté le 10.10.2021


 

La troisième édition du Salon du DVD réunit cette année au Village du MIFC seize éditeurs venus présenter au public leur catalogue. L’occasion de prendre le pouls d’un secteur chahuté par la dématérialisation du monde… Trois éditeurs indépendants, Le Chat qui Fume, Extralucid Films et La Traverse répondent à nos questions.

 

Pouvez-vous nous présenter votre société ?   

Stéphane Bouyer : Le Chat qui Fume a 16 ans et 125 titres à son catalogue. Nous proposons des films rares, plutôt fantastiques, horrifiques, ou érotiques. S’il y a une ligne, il faut plutôt la chercher du côté des raretés ou des films oubliés. Nous publions aussi de gros titres comme La Balance ou Possession – un de nos beaux succès avec 3000 exemplaires vendus -, qui permettent d’attirer l’attention médiatique sur notre travail. La presse est un peu paresseuse, parfois.

Carine Bach : Nous allons fêter les deux ans d’Extralucid Films à Lyon, le 13 Octobre ! Nous avons édité près de 20 films, qui se répartissent en 4 collections, respectivement consacrées aux films fantastiques des années 70 et 80, à des films plus contemporains, à des films d’animation, et aux femmes réalisatrices, pour laquelle nous sommes associés à l’éditeur Elephant Films.

Gael Teicher : La Traverse a 10 ans. Notre travail repose sur quelques directions essentielles : d'une part, les oeuvres rares, les cinéastes rares, parce qu'ils sont hors des circuits de diffusion traditionnels – comme Jean-Daniel Pollet, Pierre Creton ; ou parce qu'ils appartiennent à ce qu'on appelle les "cinématographies peu diffusées" - par exemple les cinéastes d'Afrique. Enfin parce qu'il s'agit de films "enterrés" depuis belle lurette - souvent pour des problèmes de droits, et/ou de matériel éparpillé, abîmé. Autre axe de notre travail, les portraits d'artistes.

 

Habiter_Pierre-Creton_couv3D

 

Comment va l’édition physique ?

Stéphane Bouyer : L'édition va mal mais elle est maintenant recentrée sur de vrais passionnés, "cinéphages", qui veulent découvrir des films jamais ou rarement vus. On est une petite structure, avec seulement deux salariés, alors un certain volume de ventes peut être rentable pour nous alors qu’il ne le serait pas pour de plus gros éditeurs. Et on fait de la vente directe, nos films ne sont pas dans les Fnac, donc notre marge est plus importante. On vend aussi beaucoup à l’étranger, surtout quand il s’agit de films français.

Carine Bach : C’est devenu un marché de niche mais, paradoxalement, de nouveaux éditeurs apparaissent ! C’est dire l’espoir et la foi que nous avons en le support physique à l’heure du tout numérique et de la multiplication des plateformes VOD/SVOD…L’édition physique s’adresse désormais de plus en plus aux collectionneurs.

Gaël Teicher : Que dire ? Comme ci, comme ça. Ou comme si, comme ça, répondrait Michel Deguy. Ça va, ça vient, ça s'en va et ça revient. Les deux termes sont importants, "édition" et "physique", créer et diffuser des objets qu'on tient en main, ou dans sa poche ou dans son sac, qu'on range plus ou moins bien dans sa bibliothèque ou sa DVDthèque (plus ou moins bien parce que la question revient sans cesse : quel classement adopter ?). Elle est économiquement bien plus fragile qu'elle ne le fut, alors qu'elle est de plus en plus indispensable, parce que le matériel est sans doute un bien commun plus que le... dématériel ? Y aurait-il vraiment une histoire du cinéma aujourd'hui si le négatif n'avait pas existé ?

 

Parmi vos dernières parutions, quelle est celle à ne pas manquer ?

Stéphane Bouyer : Bayan Ko, un film mythique de Lino Brocka, totalement perdu pendant 35 ans. C’est un film politique, mis en scène comme un polar. On est fier parce que les archives philippines nous en ont demandé une copie, même eux n’en avaient pas ! Il est en salles en ce moment, il sort en blu-ray en novembre.

Carine Bach : Mon coup de cœur de l’année, c’est Bubble Bath, un film d’animation hongrois de 1980, une comédie musicale expérimentale synchronisée aux battements du cœur ! Il est tellement riche, généreux, enthousiasmant… Et malgré sa restauration par le Film Archiv hongrois et sa sélection à Annecy Classics, son exposition est restée plus que discrète dans la presse.

Gaël Teicher : La trilogie de livres-DVD consacrée au travail de Pierre Creton, Habiter, Sur la voie et N'avons-nous pas toujours été bienveillants - parus en mars dernier. De quoi découvrir une œuvre somptueuse, dont on ne connaît finalement que les trop rares longs métrages sortis en salles.

 

Bubble-Bath

Bubble Bath, 1980

 


Pour retrouver les catalogues :

www.extralucidfilms.com

www.lechatquifume.com

www.latraverse-films.com (prochainement)

 

Salon du DVD - 3e édition
Dimanche 10, 10h30 – 19h30 Village du Marché International du Film Classique | Rue du Premier-Film, Lyon 8ème


 

Catégories : Lecture Zen