Conversation

« La réalité est une arnaque »


Posté le 17.10.2021



Le cinéaste espagnol Juan Antonio Bayona a placé son œuvre sous le signe de l’imaginaire. Il en donne les clés.

 

Des rêves à la réalité

J’ai toujours eu un rapport instinctif aux histoires qu’on me propose de mettre en scène. Mon confrère, Julio Medem, dit “on rêve d’abord et on cherche le sens de ces rêves ensuite”. Les grands films sont ceux qui vont au-delà des mots.

J’ai grandi en regardant à la fois des films fantastiques et d’horreur et puis le cinéma européen qu'on passait à la télévision, Kubrick, Truffaut, etc… C’est la base de ma cinéphilie.

 

Des monstres...

Le monstre détient la solution qui débloque la situation dont le protagoniste n' est pas conscient. Il vient pour te réveiller avant de te donner accès à une nouvelle réalité. Mais le monstre, c’est toujours nous-mêmes, l’adulte en nous. Pendant la préparation de Quelques minutes après minuit en parlant du scénario à un copain psy, j’ai été conduit à transformer l’apparence physique du monstre pour qu’il ait l’allure d’un homme.

 

MC-Bayona-Loic-BENOIT-1 © Loic Benoit

 

… et des influences

Depuis l’enfance je me suis toujours ingénié à m’éloigner de la réalité parce qu’elle me semblait être une arnaque. La première fois, c’était en allant voir Tarzan à New York au cinéma avec mon père. Il y a cette scène où pour échapper à la police il saute d’un pont dans la rivière. Génial. Puis mon père m’a dit : “tu sais que s’il fait ça dans la vraie vie, il se tue”. Je me sens encore enfant, car j’approche les films d’abord par l’émotion.

 

Premiers pas

Quand j’avais 15, 16 ans j’ai eu mes entrées au Festival du film fantastique de Sitges en inventant que j’animais un programme de cinéma pour une radio associative. Je voyais cinquante films par semaine et en plus on me proposait de faire les interviews de réalisateurs présents, comme Alejandro Jodorowsky et bien sûr Guillermo del Toro. Il m’a dit que mes questions l’avaient amusé et j’ai fini par faire mon premier film, L’Orphelinat, qu’il a produit.

Geraldine Chaplin est dans tous mes films. ça me donne l’occasion de parler avec elle qui est une légende. Elle a vu passer tout le XXe siècle au cours de sa vie. Je me souviens d’une fois où lui parlant pendant dix minutes du film Capote, elle m’a dit qu’elle l’avait connu. Quand j’étais môme, chaque fois que je la voyais, dans les films de Carlos Saura notamment, elle me faisait peur, d’autant plus que c’était comme des films bizarres de fantômes sans fantômes. C’est pour ça que j’ai voulu travailler avec elle. 

 

MC-Bayona-Loic-BENOIT-2 © Loic Benoit

Projets

La série Le Seigneur des anneaux que j’ai réalisée et produite pour Amazon sera visible bientôt. J’ai réalisé les deux premiers épisodes et supervisé les six suivants. En janvier, si tout va bien, je vais tourner de nouveau en espagnol. Ce sera la première fois en 14 ans. 

 

Propos recueillis par Carlos Gomez

 

Catégories : Lecture Zen