Ça se passe

à Lumière


Posté le 15.10.2021


 

Frédéric Bonnaud, directeur de la Cinémathèque Française, présentant la séance rassemblant Le Sang des bêtes, de George Franju, et Un chien andalou, de Luis Buñuel.

"Merci à Lumière d'avoir accepté ce drôle de double programme. Je pense à la faillite des bouchers dans quelques minutes ! Vous allez voir un programme dur, violent. C'est le premier court métrage de Georges Franju qui va devenir un très grand cinéaste du fantastique à la française, qui donne aujourd'hui des films comme Titane. Pourtant Le Sang des bêtes est un documentaire, la preuve que docs et fiction ne s'opposent pas. Au départ, Franju ne cherchait pas à faire du cinéma à tout prix. Il est de la génération qui vient de vivre la seconde guerre mondiale, un traumatisme absolument énorme. Alors que le calme est revenu, quand il découvre le sort réservé aux bêtes, comment on les massacre pour se nourrir, il décide de faire un film. Ce que vous allez voir est absolument réel, mais vous allez y voir aussi un film fantastique car Franju montre comment les équarrisseurs, les bouchers, les abatteurs sont malades de leurs métiers.

Vous allez voir aussi le premier film muet de Buñuel et Dali qui sont à l'époque deux très jeunes inconnus qui ont décidé de filmer leurs rêves avec l'argent donné par la mère de Buñuel. Ils vont tourner Un chien andalou, dont la logique narrative relève aussi du fantastique C’est un film qu'il faut regarder en se laissant aller, car il est fait d'associations de pensées et en même temps il raconte la plus vieille histoire du monde, comme dirait Coluche : l'histoire d'un mec qui se fait plaquer par sa gonzesse. Lors de la première, Buñuel avait les poches pleines de pierres prêtes à être balancées sur les gens qui sortiraient avant la fin, mais le public était constitué de personnalités surréalistes dont André Breton, et après la projection Dali et Buñuel ont été adoptés et sont devenus officiellement des surréalistes."

 

La réalisatrice Bette Gordon et la photographe Nan Goldin présentant Variety

Bette Gordon : « Variety est un film sur le plaisir de filmer et de regarder. Mon amour du cinéma passe par l'amour du regard. En me baladant un jour je suis tombée sur ce cinéma, le Variety, qui avait une belle décoration rouge et bleue qui m'attirait. J'ai vu ensuite que c'était un cinéma porno, c'était encore mieux : la pornographie c'est aussi le plaisir de regarder. Ce film parle aussi de l'exploration du plaisir féminin. Je voulais que l'héroïne de cette histoire ne soit pas présentée comme un objet mais comme sujet de plaisir. Nan Goldin m'a emmené dans son univers, elle a été mon guide, mon entrée dans ce monde, elle est mon amie. »

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La réalisatrice Bette Gordon et la photographe Nan Goldin présentant Variety.
© Léa Rener

 

Nan Goldin : « C'est un film sur le New York pré-sida, c'était une époque où la ville était libre. C'était juste avant que le SIDA nous prenne tant d'amis. C'était aussi l'époque pré-internet, la pornographie était différente et il fallait aller la trouver dans ces lieux interlopes. »

 

Propos recueillis par Virginie Apiou et Laura Lépine

 

 

Catégories : Lecture Zen