Posté le 16.10.2021
Habitué du festival Lumière, Gaspar Noé livre un film sidérant sur le couple et la vieillesse.
En 2019 Gaspar Noé a vécu une expérience hors du monde, une hémorragie cérébrale qui lui a fait frôler la mort. De cette épreuve marquante il a tiré une oeuvre unique, multiple, peut-être son plus beau film : Vortex. Derrière ce titre qui sonne comme un voyage en rond frénétique, Noé accompagne en réalité un couple si vieux qu’il évolue comme aveugle et fluide à travers les boyaux d’un appartement-terrier. L’homme est encore un peu dans sa vie extérieure (Dario Argento, en cinéaste toujours en alerte). La femme est déjà dans une autre dimension (Françoise Lebrun, en épouse dont la mémoire s’efface). Seules quelques visites de leur fils plus si jeune mais toujours en difficulté (Alex Lutz) sonnent comme une modernité lointaine.
Vortex, 2021
Vortex est un grand film sur l’intimité la plus extrême, celle de réussir à tenir seul avec soi-même, peu importe que, comme les héros, vous ayez une famille ou pas. Pour incarner pleinement les vies de ses personnages, Noé utilise le split screen, méthode de division de l’écran qui n’a jamais été aussi justifiée que dans ce film. Le rythme naturellement lent de ce couple âgé permet au spectateur d’avoir le temps d’évaluer simultanément les différentes images de leurs vies.
On prend ainsi la mesure de bons nombres de choses sur l’union de deux êtres, la fin de la vie, et tous ces gestes automatiques et personnels, accomplis alors que personne ne nous voit, comme ce drap dont la femme recouvre son visage alors qu’elle est au creux de son lit. Cette image en dit long sur son laisser-aller gracieux et sur la qualité de réalisation de Noé, qui livre là formellement, mais pas seulement, un plan tout à fait inoubliable.
Virginie Apiou
Séance :
Vortex de Gaspar Noé (2021, 2h22)
UGC Confluence sa 16 à 14h15